Une Eglise ouverte

Sainte-Marie Mulhouse : un signe au cœur de la ville

Le paysage ecclésial n’a cessé de changer ces dernières décennies. Le rapport au temps et à l’espace n’est plus le même : il induit de nouveaux comportements, chez les « fidèles ».

Si hier, la vie s’organisait autour de l’église du quartier, comme autrefois autour de l’église du village, aujourd’hui les chrétiens n’hésitent pas à se déplacer pour pratiquer dans telle église, pour rejoindre un lieu de réflexion et d’échange. Ces mutations ont poussé l’Église à s’interroger : comment prendre en compte ces mouvements ? Quelles propositions faire ? L’expérience de Sainte-Marie à Mulhouse s’inscrit dans cette recherche.

Vers de nouveaux horizons

Forte de l’appui de l’évêque, l’équipe a poursuivi sa recherche et pris de nouvelles initiatives, en développant la collaboration avec le Centre Porte Haute. Mgr Christian KRATZ, évêque auxiliaire et vicaire épiscopal de la zone pastorale de Mulhouse, a accompagné la réflexion, en participant à toutes les rencontres et en soutenant le projet.

Au printemps 2003, le conseil de la zone pastorale a pris en compte la vocation particulière de Sainte-Marie dans le nouveau paysage ecclésial qui se dessinait avec la mise en place des communautés de paroisses. L’équipe de réflexion a fait le point de ce qui existait et de ce qui serait à développer autour de sept pôles retenus : Accueil – Prières et célébrations – Chemins de spiritualité – Formation – Initiation chrétienne- Œcuménisme et interreligieux – Présence à la ville et au pays.

Pour préciser la mission de Sainte-Marie – Église Centre Ville, sa place dans l’Église locale et les modes d’animation, l’équipe a fini par rédiger une charte, où elle commence par rappeler l’originalité :

« Sainte-Marie – Église Centre Ville est un lieu ecclésial qui a reçu de l’évêque la mission d’être un signe au cœur de la ville en faisant exister l’accueil, la prière, des propositions de formation et d’initiation chrétienne, des démarches œcuméniques et interreligieuses. Elle n’a de raison d’être que si elle est considérée comme un service pour la population du pays et de l’Église de la zone pastorale. »

Almanach Sainte-Odile 2007 – Diocèse de Strasbourg – Église catholique d’Alsace, p. 30-31.

Léonard BASLER, curé de la paroisse Sainte-Marie et prêtre responsable de Sainte-Marie église centre ville du printemps 1994 à l’automne 2005.


Une église « ouverte » et « hors les murs »

L’église se situe dans le centre historique, à deux pas de la place de la Réunion avec l’hôtel de ville et le temple Saint-Étienne, à un pas d’une station de tram. Ouverte tous les jours, elle se veut accueillante, signifiante et vivante. Si les catholiques du quartier, avec ses sept résidences pour personnes âgées, peuvent s’y rassembler pour célébrer, elle offre aux personnes qui passent (celles qui se rendent à leur travail, celles qui viennent consommer ou se détendre, celles qui viennent visiter une église néo-baroque, celles qui errent dans la ville…) un lieu d’accueil, de silence et de recueillement, de prière et de dévotion, de parole possible, d’expérience d’une présence.

Il ne suffit pas d’ouvrir les portes et de veiller à la beauté du lieu. À certaines heures, un membre de l’équipe d’accueil offre une présence souriante et rassurante, faite de disponibilité pour répondre à des demandes d’information ou à l’attente d’un échange. Deux fois par semaine, un prêtre de l’équipe réconciliation accueille pour la confession.

Si la Fête de la musique et les Journées du patrimoine fournissent l’occasion, pour de nombreux « passants », de pousser la porte, l’équipe de réflexion et d’animation a toujours porté le souci de rejoindre les hommes et les femmes en quête de sens, dans d’autres lieux, à travers l’une ou l’autre proposition.

« Livre et Spiritualité », en partenariat avec la Bibliothèque-médiathèque de Mulhouse, propose des rencontres avec l’auteur d’un ouvrage spirituel récent et marquant.

Le FASM (Festival d’art spirituel de Mulhouse), né d’une collaboration avec les frères protestants de l’association Saint-Étienne Réunion, invite tous les deux ans à participer à des ateliers d’expression (calligraphie, danse, peinture…), à des rencontres d’échange sur un thème ou à partir d’un film, à des représentations théâtrales.

La Toussaint au cimetière. Dans la chapelle du cimetière central, des groupes se relaient pour assurer une présence priante. Les familles qui viennent se recueillir sur la tombe d’un être cher trouvent la possibilité de faire une halte, en participant à la prière ou en déposant un lumignon.

Le GAIC (Groupe d’amitié islamo-chrétienne), en lien avec la pastorale des migrants, organise chaque année une semaine de rencontres. C’est un temps fort qui amène à se rencontrer tout au long de l’année, dans un climat d’écoute et de dialogue, où chacun s’enrichit.

L’œcuménisme se vit d’abord au sein du Groupe œcuménique centre ville, qui organise des temps de réflexion et de célébrations. Il se vit sur le terrain au sein de différents groupes : le Festival d’Art Sacré de Mulhouse, Livre et Spiritualité, les Rencontres Comenius qui proposent des conférences dont l’objectif est de donner des outils de réflexion sur l’actualité. Une expérience vécue ici et ailleurs.

C’est vers la fin des années 1980 que les vicaires épiscopaux des villes moyennes se sont réunis pour réfléchir à de nouvelles formes de présence d’Église en ville. Rodolphe Vigneron, vicaire épiscopal de Mulhouse, a proposé à Raymond Schwertz, curé, de lancer Sainte-Marie dans cette recherche. Elle était menée dans d’autres régions du monde, de Québec à Lyon, de Papeete à Butare, d’Athènes à Zurich autant par des protestants et orthodoxes que des catholiques. En 1995, des théologiens et des pasteurs se sont retrouvés à Montréal, pour mettre en commun réflexions et expériences sur le thème : « Les défis de la ville à la théologie pratique ». Sur la question des rapports entre « Église en ville » et paroisses, Hans Strub, chargé de formation dans les églises réformées de la Suisse alémanique, faisait part, à partir des expériences de Bâle, Berne et Zurich, de ses convictions :

« L’Église en ville s’inscrit dans le cadre des paroisses existantes comme un rassemblement. Elle ne fait pas concurrence au travail territorial. Elle y implante d’autres champs. Elle crée un espace humain au milieu de la ville, dans lequel des activités peuvent surgir. Les centres des villes pourraient devenir des champs d’expérimentation pour une Église qui passera, rajeunie et en pleine forme, le cap de l’an 2001 »

En novembre 1999, au cours de sa visite pastorale, Mgr Joseph Doré a rencontré l’équipe de recherche et de réflexion de Sainte-Marie. Il a accueilli et reconnu l’originalité d’un nouveau visage d’Église au cœur de la ville. Il a encouragé l’équipe à poursuivre l’expérience, en lui confiant la double mission : « faire exister l’accueil » et « faire exister la prière ».


Histoire de l’église Sainte-Marie

Le couvent et l’église sont construits par les Franciscains durant la seconde moitié du XIIIe siècle.     L’église est construite sur pilotis. Il y avait un cimetière autour de l’église où les nobles et les Franciscains étaient enterrés.

A la Réforme, l’église Sainte-Marie est réquisitionnée puis saccagée et servira d’arsenal ou de grenier. En 1803, il y aura un culte protestant. Elle reviendra petit à petit au culte catholique à partir de 1812. En 1846, l’église est dédiée à la Vierge Marie, mère auxiliatrice des pauvres.

Principales dates

1246 : Chapelle des Franciscains. 

1297 : Les Franciscains de Mulhouse sont cités pour la première fois dans un document. 

1524 : L’église et le couvent sont sécularisés. L’église est passée à la Réforme. 

1529 : Mise à sac par des partisans de la Réforme

XVIe s. : Grenier d’abondance et arsenal. 

1661 : Le chœur est affecté au culte réformé de langue française. 

1803 : Le chœur est réaffecté au culte catholique 

1809 : Le Conseil municipal vote l’agrandissement de l’église 


1810 : Le devis fait par l’architecte prévoit la démolition des deux extrémités de l’église. A ce projet est inclus la construction du clocher actuel. 

1825 : Construction d’un plancher dans le grenier de l’église pour la couverture et la conservation du plafond. 

1826 : Construction d’une sacristie 

1837 : Nécessité de nouvelles réparations 

1860 : L’église des Franciscains prend la dénomination de Sainte-Marie Auxiliatrice.

1865 : Vote du Conseil municipal créant une deuxième paroisse catholique.

1866 : Décret de l’empereur Napoléon III. L’église est officiellement élevée au rang de seconde église paroissiale sous le vocable de « Sainte-Marie auxiliatrice des Chrétiens ». 

1869 : Les cloches sont enfin suspendues et sonnent à la satisfaction de tous. Elles ont été fondues par Charles Joseph Honoré Perrin, de Robecourt, Vosges, considéré comme un des meilleurs fondeurs de cloches du XIXe siècle. 

1869 : Réfection de la nef, du chœur et de la tour 

1875 : Réfection complète de l’église. 

1880 : Reconstruction du presbytère de l’église au numéro 1 rue du Temple (actuelle rue du Couvent), sur l’emplacement de l’ancien. 

 1910 : Rénovation extérieure de l’église, suivie d’une rénovation intérieure et du changement d’orgue par la maison Rinckenbach. 

 1912 : Réouverture de l’église et fête du centenaire de la rénovation. 

1935 : Rénovation intérieure de l’église et installation du chauffage central.

 1961 : Travaux de réfection des murs extérieurs en grès rose de la façade. Rénovation intérieure. 1988 : Dernière restauration complète.

2002 : Installation le 8 Septembre du tableau de Notre-Dame de Vailankanni.


Une histoire mulhousienne

Pour bien comprendre la destinée de notre « Vieille Église », connue par les anciens Mulhousiens sous le vocable de « D’ Alte Kirch » (La Vieille Église), il faut remonter aux origines de la ville et de la première paroisse de Mulhouse, ainsi qu’à la fondation des couvents dans l’enceinte de cette cité de jadis. On ne peut dissocier l’évolution de la ville et celle de la première paroisse catholique de Mulhouse, leurs histoires étant étroitement liées.

La paroisse primitive de Mulhouse avait érigé dès le XIIe siècle une église à l’endroit même où s’élève aujourd’hui le temple protestant Saint-Etienne, place de la Réunion, construit de 1859 à 1866. De l’ancien sanctuaire, il ne reste que les magnifiques vitraux réinstallés dans le nouveau temple.

Deux chapelles, l’une dédiée à Saint Nicolas en 1458 située à l’angle de la rue du Raisin et la rue des Trois Rois, l’autre dédiée à Notre-Dame placée à l’angle de la rue de la Loi et de la rue Sainte-Claire, servaient d’annexes à l’église paroissiale.

Dès le début du 13ème siècle nous trouvons à Mulhouse la présence de plusieurs couvents dont la vie religieuse prend vite un essor considérable. Les Franciscains arrivèrent probablement à Mulhouse en 1231 pour y fonder un couvent et une église. C’est l’actuelle église Sainte-Marie. L’ordre féminin de Saint François, les Clarisses, avaient son couvent et son église sur l’emplacement de l’actuelle synagogue. L’établissement se doublait d’un hôpital, les religieuses s’occupant en plus de leur prière, du soin des malades et de l’éducation des jeunes filles de la ville. Elles quittèrent Mulhouse en 1522, les dernières en 1529 chassées par la Réforme.

En 1269 les Chevaliers de Saint-Jean fondèrent leur établissement au fond de la Grand-Rue.

Leur chapelle, qui fut un bijou de l’architecture gothique, sert aujourd’hui de lieu d’animation culturelle. C’est avec l’ancienne église des Franciscains le seul vestige des monuments religieux de notre ville d’avant la Réforme.

Ces chapelles ainsi que d’autres, comme les différentes fondations de l’époque, furent victimes de la Réforme introduite à Mulhouse dès 1523. Les couvents étaient sécularisés un à un, les chapelles désaffectées et converties en arsenal. Il ne subsista que l’église Saint-Etienne sur la grande place et l’église des Franciscains dont nous allons voir un peu plus en détails l’histoire à travers les siècles jusqu’à nos jours.

I. L’église avant la Réforme


La date exacte de l’arrivée des Franciscains à Mulhouse est inconnue. Selon un document retrouvé par l’abbé Joseph Kuntz aux Archives d’État de Bâle-Ville, il apparaît avec certitude que les Franciscains se sont installés la même année tant à Bâle qu’à Mulhouse, c’est-à-dire en 1231. Pour ceux-ci, leur habitation provisoire devait être très vite remplacée par un couvent définitivement construit dans la Wunnenbergergasse devenue l’actuelle rue des Franciscains.

Parmi les monuments du Moyen-Âge actuellement conservés à Mulhouse, l’église des Franciscains est un des plus anciens. D’après Mathieu Mieg, elle fut construite en 1246 par les Franciscains venus à Mulhouse en 1231. Les tours de Nessel et du Diable ne furent commencées qu’en 1255, la chapelle des Chevaliers de Saint-Jean construite en 1269 et le Bollwerk érigé en 1397. Ceci pour donner des repères historiques et signifier l’âge de cette église. C’est en 1297 que les Franciscains de Mulhouse sont cités pour la première fois dans un document.

Nous ignorons le titre de l’église conventuelle de l’époque. L’église des Franciscains était construite dans un style gothique tel que nous le retrouvons encore de nos jours dans les églises conventuelles de Rouffach, de Bâle (musée historique), Colmar ou Guebwiller (église des Dominicains). C’était une petite cathédrale gothique, elle avait une vaste nef surmontée d’un plafond et d’une énorme toiture que l’on voit encore, sans clocher, les couvents n’ayant droit qu’à une cloche ; la sonnerie était réservée à l’église paroissiale.

 Le chœur seul était voûté et réservé aux stalles des moines, il communiquait avec le couvent situé à la place du presbytère actuel et une porte donnait accès au cimetière des religieux.

 La nef unique et spacieuse était recouverte d’un plafond en bois plat, ornée d’un mobilier gothique en particulier une chaire placée au même endroit que celle d’aujourd’hui, en face de la porte principale d’entrée. A l’époque il n’y avait qu’une porte donnant sur l’extérieur, côté rue des Franciscains actuellement. La construction était simple et imposait surtout par son architecture. On ne peut que regretter les transformations ultérieures qui ont fait disparaître le style ogival du sanctuaire et son aspect primitif qui eût bien mieux évoqué le cadre dans lequel vivaient les religieux d’antan. Mais Mulhouse n’a jamais su conserver ses monuments anciens.

Cette église, d’après le plan de Mérian, dépassait de haut toutes les maisons du voisinage. Elle était le siège de diverses confréries (St Roch, St Josse, St Sébastien et autres), chacune y possédant un autel. On y trouvait un autel des saints apôtres et à l’entrée du choeur le maître-autel. Les Mulhousiens venaient y faire leurs dévotions, même des pèlerinages.

Vers 1350, les Franciscains de Mulhouse abandonnèrent la règle de pauvreté. C’est pourquoi leur couvent reçut alors de nombreuses donations, des terres et des revenus, d’autant que les moines jouissaient d’une grande popularité auprès de la noblesse et de la bourgeoisie de la ville et des environs. L’église des Franciscains servait également de lieu de sépulture à ces nobles et bourgeois comme les familles Zu Rhein, Andlau, Eptingen, Hagenbach, Landenberg, Nuremberg, Zobel.

Deux dates sont remarquables dans l’histoire de l’église des Franciscains avant la Réforme :

 En 1473, (décembre) , Charles le Téméraire menaça d’assiéger la ville. La terreur régna quelque temps dans la cité mais la population entière organisa une procession en visitant toutes les chapelles et les murs de l’enceinte. Cette grande procession partie de Saint-Étienne, se termina dans l’église des Franciscains où les bourgeois décidèrent de résister à l’agresseur en y faisant célébrer une grande messe très solennelle pour implorer le ciel et se mettre sous la protection divine. Dans la nuit, l’Ill, grossie par une pluie diluvienne, déborda de toutes parts et fit de la ville une île. Le Téméraire jugea prudent de remettre à plus tard ce siège. Mais sa mort devant Nancy ne lui permit jamais de l’exécuter : la ville était sauvée.

 En 1506, le 5 juin, fut proclamé dans l’église des Franciscains le traité d’Alliance que Mulhouse contracta avec Bâle et les Confédérés suisses, devant toute la population et la bourgeoisie réunies. Un office solennel suivi du Te Deum clôturèrent cette cérémonie.

 En 1515, le 19 janvier, selon le Serment, cette alliance conclue dans un premier temps pour vingt ans, devait être élargie à l’ensemble des treize cantons et déclarée perpétuelle.

II. L’église pendant la Réforme

En 1523, Mulhouse adopte la Réforme qui débute par une simplification du culte mais dès 1520, des prédicateurs réformés avaient été invités par le Magistrat et c’est lui qui introduisit les doctrines nouvelles dans la ville. La messe fut d’abord conservée, pour ne pas effaroucher les bourgeois, mais uniquement dite en langue allemande. Ce qui laisse à penser à une opposition et des heurts entre les deux communautés. Peu à peu la sainte messe fut remplacée par un culte composé de Psaumes chantés, également en allemand, suivis d’un prêche.

Les moines et occupants des différents couvents se comportèrent de façon diverse. Les Augustins adhérèrent en masse à la Réforme, tandis que les Franciscains résistèrent longtemps sous le commandement héroïque de leur supérieur le Père Jean Habermann, un mulhousien. Celui-ci ne se laissa pas fléchir ni sous les menaces, ni sous les promesses et quitta le dernier son couvent pour se retirer à Thann. Grâce à lui une partie des biens fut sauvée et transférée dans le couvent de Thann.

 En 1524, le 30 octobre, le Magistrat et les membres du conseil de la ville dressèrent un inventaire des biens ayant appartenu aux différentes Confréries d’Eglise.

 En 1529, eut lieu à Berne une disputation religieuse à laquelle Mulhouse prit part, le 9 février de la même année. La populace de Bâle se rua dans les églises pour saccager les statues et les ornements. Mulhouse suivit son exemple et le deuxième dimanche de Carême l’église ainsi que le couvent furent saccagés par un commando du greffier syndic Achatius Behm qui s’empara, au passage, des calices, de l’ostensoir, des vases sacrés et des ornements de toutes sortes. Ainsi fut détruite l’ornementation de l’église, notamment les autels, l’orgue, les tableaux et les vêtements liturgiques. Seul le Christ en croix dans la nef actuellement, proviendrait – dit-on – de l’ancien sanctuaire des Franciscains, une œuvre impressionnante datée par les Monuments historiques de 1488. Les monuments funéraires furent également détruits et leurs éléments utilisés pour la réfection du mur d’enceinte. A grand-peine, le Magistrat put sauver les précieuses verrières de l’église Saint-Étienne qui sont ainsi parvenues jusqu’à nous.

A ce moment, la nef fut séparée du choeur par un mur et fut convertie successivement en arsenal, un dépôt de grains et finalement de bois. Seul le jardin continua à être cultivé pendant un temps. En 1557, on exploita passagèrement la première imprimerie mulhousienne dans les locaux d’habitation, faute de moyens. Elle ferma en 1564.

 En 1559, le Conseil de la Ville décida de transférer le cimetière qui se trouvait derrière l’église Saint-Etienne, devenue protestante, dans l’ancien cimetière et le jardin des Franciscains et ce jusqu’en 1834 d’où il fut transféré au jardin Salvator, pour permettre la construction de l’école centrale.

 En 1564, l’ancien chœur des moines avec ses stalles servit exclusivement de chapelle d’enterrement et aussi de local pour l’instruction des catéchumènes se préparant à leur Confirmation. Mulhouse est entièrement passée à la réforme et pendant plus de deux siècles, le catholicisme restait proscrit en ville qui ne comptait plus aucun bourgeois catholique. Tout au plus, tolérait-on, des domestiques catholiques tout en leur interdisant de se marier à Mulhouse et d’y fonder un foyer. Ils devaient habiter dans les hostelleries ou en dehors de la ville pour bien marquer qu’ils ne faisaient point partie de la communauté et ce jusqu’au début du XIXe siècle.

 En 1658, les officiers calvinistes de la garnison de Brisach vinrent à Mulhouse célébrer la Sainte Cène à Pâques. Par l’intermédiaire de la Princesse Anne de Châtillon, épouse du Prince Georges de Wurtemberg, la ville de Mulhouse offrit aux Calvinistes de célébrer leur culte dans le chœur de l’église des Franciscains. Constantin de Rocbine, un des officiers s’installa à Mulhouse et subventionna un pasteur de langue française. La ville de Mulhouse fit alors aménager le chœur en temple protestant.

 En 1661, le 26 octobre, eut lieu le premier culte en même temps que l’installation d’un pasteur de langue française. Ce fut la première communauté de « Huguenots » qui construisit plus tard (en 1836) le temple Saint-Jean, rue de la synagogue. En 1803, le dernier pasteur, Pierre Risler est resté célèbre par son dévouement pastoral et sa grande bonté.

La nef de l’église donc demeura arsenal et on y remisa les « gros » canons municipaux.

Mulhouse, ville suisse, traversa la Révolution sans encombre et comptait en 1800 environ 6000 habitants.

 En 1798, Mulhouse renonça à ses droits de République indépendante ainsi qu’à l’alliance avec la Suisse pour se réunir à la France. A ce moment, tous les cultes furent suspendus. De nombreux catholiques arrivèrent dans la cité, d’autant plus que l’industrialisation demandait une main d’oeuvre nombreuse. C’est pourquoi dès le début du XIXe siècle, il y eut à Mulhouse des prêtres catholiques qui trouvèrent asile chez deux familles protestantes : Mansbendel et Laederich ; de même, on mit à leur disposition deux chambres pour dire la messe.

 En 1801, le concordat prévoyant une paroisse dans chaque commune habitée par des catholiques, imposa donc à la ville de Mulhouse de mettre à la disposition des fidèles un lieu de culte.

III. L’église paroissiale de Mulhouse

En 1803, le 3 mai, eut lieu l’installation officielle d’un curé catholique, en présence du Maire et de ses adjoints, du juge de paix et de plusieurs bourgeois. Le nouveau curé, Etienne Beck, ancien Jésuite, ne reçut cependant pas de lieu de culte de la ville et dut se contenter d’une pauvre chambre située au 11 de la Grand-rue pour célébrer la messe. C’est dans cette chapelle improvisée que le curé Beck administra le premier baptême catholique, le 13 octobre 1803 (Winterer).

 En 1803, octobre, la paroisse protestante française transféra son culte à Saint-Etienne (place de la réunion) dans le temple protestant de Mulhouse.

 En 1804, le 18 mars, le préfet du Haut-Rhin ordonna que le chœur de l’église des Franciscains rendu disponible par le départ de la paroisse française, soit cédé au culte catholique. Voilà enfin une église paroissiale que le curé dédia à Saint-Etienne pour la replacer sous la protection du grand Saint, patron de la ville depuis plus de dixsiècles. Dans le chœur on plaça treize rangées de bancs, soit 130 places, un pauvre autel très primitif mais plus aucune trace des anciens ornements. La population catholique de Mulhouse allant en augmentant, le choeur ne suffisait bientôt plus aux paroissiens.

 En 1806, un ami du curé, l’abbé Simon de Bourg, fit don à l’église d’un nouveau dallage quadrillé rouge et blanc ainsi que de trois grandes peintures à l’huile qui furent placées dans le choeur. Après quelques années seulement, cette église se révéla trop petite, les gens se tenant debout de l’entrée de l’église jusque dans la rue, l’actuel vestibule de la sacristie. Le conseil de fabrique soumit une supplique au préfet en demandant l’usage de la nef entière. Le sous-préfet d’Altkirch vint sur les lieux, accompagné d’un architecte et fit estimer le coût des travaux nécessaires (12.088 F). Le dossier fut envoyé au ministère le 12 septembre 1808, qui communiqua sa réponse à la ville fin novembre de la même année.

 En 1807, le sous-préfet d’Altkirch -Mulhouse n’étant pas encore sous-préfecture- proposa à la municipalité de Mulhouse de céder également la nef aux catholiques. Ce que le Conseil  de la Ville refusa et ne voulant céder que la moitié de la nef.

Dans une demande non datée adressée à la mairie, le Conseil de fabrique précise que le choeur est totalement insuffisant, ne contenant que 130 places dans deux rangées de treize bancs à cinq places chacun. Le Conseil estimait le nombre de paroissiens à un millier minimum.

 En 1809, la ville de Mulhouse décida, le 1er mai, que « la commune de Mulhausen » offre pour l’agrandissement de l’église la concession gratuite du bâtiment attenant à l’église depuis la porte de cette église jusqu’à la petite porte donnant sur la rue en face de la maison Pierre Schlumberger et Blech-Reber (actuel Loewenfels) offrant ainsi la moitié de la nef.

 En 1809, on comptait déjà 140 familles catholiques à Mulhouse et la chronique de cette année-là cite environ 1200 communions pascales.

 En 1809, le 30 décembre, un décret impérial autorise le préfet à prendre un arrêté obligeant la ville à mettre à la disposition de la paroisse la nef entière.

 En 1810, le 22 février, un arrêté préfectoral remit l’église entière à l’Évêque de Strasbourg de façon à pouvoir la mettre à la disposition de l’Église Catholique de Mulhouse. Et dès lors, on envisagea une restauration. Des pourparlers aboutirent à l’établissement d’un nouveau devis estimatif se montant à 35.772,79 F.

 En 1810, le 21 novembre, la ville céda la totalité de la nef, ceci d’autant plus volontiers que le financement de la restauration est assuré par le ministère. Le curé Beck eut encore la joie de voir aboutir ses innombrables démarches et mourut fin décembre 1810. Son remplaçant, l’abbé Cogniat, se trouva devant la lourde tâche de réaliser la restauration de l’église.

 En octobre 1811, le Conseil de fabrique se plaint de ne pas encore disposer de l’église. Les travaux doivent se situer au cours de l’an 1812, nous ne disposons d’aucune date précise.

 En 1812, le bâtiment fut totalement transformé. De gothique, l’ogive a disparu pour laisser place au plein cintre, il devient baroque conformément à la mode de l’époque et semblable à d’autres églises alsaciennes des villages environnants, construites dans le style « grange ».

La nef conserva son plafond en bois et fut ornée d’une corniche. La porte unique de la façade, la grande porte qui donne sur la place de l’église, fut entourée de deux colonnes et surmontée d’un fronton, après démolition de six mètres de ce pignon. Les deux petites portes latérales de cette façade sont un rajout d’une période ultérieure.

La jonction du choeur avec la nef et en même temps la séparation des deux espaces étaient assurées par un jubé assez primitif qui fut détruit pour permettre l’ouverture et la communication entre le choeur et la nef.

La nef donne de nouveau sur le choeur plus étroit que domine l’autel majeur, visible à travers une baie dont le cintre très large s’élevait jusqu’à une certaine distance du plafond. Les fenêtres ogivales furent cintrées et les vitraux reconstitués en verre blanc vibré, les murs vraisemblablement recouverts de chaux.

Le chœur fut raccourci de six mètres en vue du percement de la rue du Couvent et privé de sa voûte mais en gardant sa forme d’origine c’est-à-dire trois pans d’un semi hexagone. Les fondations des murs peu profondes furent consolidées et la rangée de monuments funéraires adossés au mur extérieur du côté cimetière fut supprimée, aujourd’hui côté parking central.

A la naissance du choeur et dans l’alignement de la nef, côté rue, on érigea une tour carrée, le clocher peu esthétique, que l’on voit encore, il fallut aussi réparer les combles et la toiture. Les travaux furent dirigés par l’architecte Jaminat et réalisés par l’entrepreneur Molly à qui la ville refusa en 1817 de payer le solde des travaux à cause de malfaçons et du non-respect du cahier des charges.

A l’intérieur de l’église rénovée, se trouvait l’autel, surmonté d’un tabernacle et d’un crucifix en bois doré. A droite et à gauche se dressaient deux chandeliers en bois doré et à chaque extrémité un petit chandelier en étain. Le dessus de l’autel était recouvert d’une nappe et d’une couverture blanches.

Comme décoration, six pots de fleurs artificielles, au banc de communion était fixée une nappe que l’on relevait au moment de la communion, il y avait aussi un avant autel (antependium). Le prêtre disposait de six aubes et de neuf chasubles dont deux rouges, deux blanches, une bleue, une verte et trois noires. Il n’y avait que quatre enfants de choeur portant robes et surplis ainsi que des ceintures rouges ou bleues suivant les circonstances. Le prêtre qui ne célébrait pas était en habit de choeur c’est-à-dire en soutane, avec un bonnet carré.

Quant aux vases sacrés, il n’y en avait aucun en or. On trouvait un ostensoir et un calice en cuivre et argent doré, un autre calice en argent doré et un ciboire en cuivre doré. On portait les hosties consacrées aux malades dans une petite boîte en bois.

Pendant les offices la quête se faisait dans une assiette plate en étain. Pour les baptêmes la paroisse possédait un baptistère en pierre avec un couvercle de bois et un cadenas. L’eau bénite était conservée dans une cuve cerclée de fer, deux bénitiers en cuivre se trouvaient à l’entrée. Deux confessionnaux complétaient le mobilier et deux grands balais servaient à dépoussiérer le choeur et à enlever les toiles d’araignées.

Les vêtements liturgiques et le linge étaient mis à l’abri dans trois armoires à la sacristie, où se trouvait également un coffre-fort en bois, les missels, un grand missel quotidien, deux petits pour le requiem, deux livres de procession et deux rituels. L’organiste disposait d’un livre annoté et de quatre livres pour chanter le requiem. Ce qui frappe à première vue c’est l’extrême pauvreté du mobilier et des accessoires liturgiques.

On est étonné que les paroisses des environs n’aient pas contribué à l’embellissement du culte à Mulhouse, mais il faut se rappeler que les paroisses rurales après les troubles de la Révolution, les confiscations interminables et le passage des armées dévastatrices étaient elles aussi réduites à un état de misère, ce dont témoignent les livres de trésorerie des conseils de fabrique toujours en déficit.

 En 1816, le 30 octobre, procès-verbal de constat : « La construction de la toiture est mauvaise et la pluie y pénètre en plusieurs endroits ».

La ville pourtant s’est toujours montrée généreuse envers la paroisse.

 En 1818, le Maire, André Koechlin, fit don à la paroisse de deux cloches et deux tableaux ainsi que des fonds d’origine protestante qui permirent d’ériger deux autels latéraux. Grâce également à un don de 1.000F du Duc d’Angoulême au cours de la même année, la paroisse fit réparer l’orgue et paya l’arriéré dû sur les bancs commandés en 1813 pour meubler la nef rénovée et avec le reste acheta un uniforme de bedeau.

 En 1822, le curé commanda une nouvelle chaire, qui est sans doute celle d’aujourd’hui, dans le style de la nef rénovée, la nef était dépareillée par la vieille chaire gothique qui avait beaucoup souffert du temps où elle servait de dépôt de bois.

 En 1825, fut construit un escalier dans la tour, elle même recouverte d’un toit de cuivre, et un plancher dans le grenier de l’église pour couvrir et protéger le plafond de la nef.

 En 1826, construction d’une sacristie plus spacieuse.

Sous le curé Lutz, le Conseil municipal continua ses largesses à l’égard de la paroisse. Ainsi, on a acquis un bel autel majeur en remplacement de l’ancien qui était trop malingre par rapport à l’ensemble du chœur. Plus tard, le curé entre en pourparlers avec le facteur d’orgue Callinet en vue de remplacer l’ancien orgue devenu vétuste et qui reposait sur le jubé très fragile pour lequel on avait proposé des colonnes de soutien. Ce jubé fut supprimé et l’orgue placé dans le fond de l’église.

 En 1834, ces travaux de restauration s’achèvent. On a abandonné le style gothique de l’ancienne église conventuelle, on avait remplacé les vitraux élancés par des vitraux larges en donnant au sanctuaire le style du classicisme. Seul l’absence de transept rappelle encore que cette église a été, pendant près de trois siècles, l’église des Franciscains.

 En 1837, le 3 août, le curé de la paroisse alerte le Conseil Municipal au sujet de nouvelles réparations urgentes pour l’église catholique qui seront immédiatement prises en charge par la ville.

Bientôt cependant, il fallut projeter de construire une autre église plus vaste, en réflexion depuis 1830 et en 1847 le plan de Jean-Baptiste Schacre fut arrêté comme définitif. Ainsi, en 1855, Mgr Raess, évêque de Strasbourg, posa la première pierre de la nouvelle église Saint-Etienne, rue de la Sinne, qui fut consacrée en 1860.

 En 1856, suite à la construction de la nouvelle église Saint-Etienne, l’église des Franciscains fut alors dénommée « Notre-Dame Auxiliatrice », nom qu’elle porte encore aujourd’hui et pendant de longues années elle fut la seule église catholique de Mulhouse.

 En 1860, après la consécration de Saint-Étienne, l’église des Franciscains fut déclarée église auxiliaire. Pour les Mulhousiens elle devint « D’ Alte Kirche » (« la vieille église »), une dénomination connue et employée aujourd’hui encore par les anciennes générations. Elle ne joue plus que le rôle d’une église annexe sans curé et desservie par un vicaire.

Entre-temps, la vieille église avait été négligée pour se trouver bientôt dans un état lamentable. Les stations du chemin de croix étaient délabrées, l’orgue a souffert lors des grosses réparations extérieures sur la partie arrière de la toiture attenant à la façade. Cette partie resta ouverte sous la pluie, l’orgue en pâtit, les anches se remplissaient d’eau, le buffet et la tribune furent inondés.

 En 1865, le 20 octobre, vote du Conseil municipal créant une deuxième paroisse catholique.

 En 1866, le 2 juin, par décret de l’Empereur Napoléon III, l’église des Franciscains fut érigée officiellement en deuxième église paroissiale de Mulhouse sous le nom de « Sainte-Marie Auxiliatrice des chrétiens » avec comme curé, un ancien vicaire de la paroisse, l’abbé Charles Landwerlin, qui fit repeindre l’intérieur de l’église en 1875.

 En 1869, le 7 avril, Sainte-Marie reçut quatre nouvelles cloches provenant de la refonte des anciennes cloches du temple protestant démoli en 1858. Elles ont été fondues par Charles Joseph Honoré Perrin, de Robecourt (Vosges), considéré comme un des meilleurs fondeurs du XIXe siècle. Ces cloches remplaçaient les deux de 1818 qui en 1895 passèrent à Sainte Geneviève d’où elles furent réquisitionnées par les Allemands en 1917. Les cloches qui font aujourd’hui encore l’orgueil de Sainte-Marie, furent baptisées : Marie, Joseph, François, Gabriel. Cette dernière, qui appelle matin et soir les fidèles à la prière, personnifie en quelque sorte le souvenir des moines qui continuent de là-haut à veiller sur leur sanctuaire où se perpétue encore la dévotion envers Dieu.

 En 1869, réfection de la nef, du chœur et de la tour jusqu’à la corniche de l’église.
 En 1875, restauration complète de l’église réalisée par le peintre Fluck.

 En 1880, reconstruction du presbytère de l’église au N° 1 de la rue du Temple (actuelle rue du Couvent) sur l’emplacement de l’ancien.

 En 1910, rénovation extérieure de l’église, suivie d’une rénovation intérieure et de la reconstruction de l’orgue par Martin et Jean Rinkenbach.

 En 1912, 19 mai, réouverture de l’église et grande fête du centenaire de l’église.

 En 1935, rénovation intérieure et installation du chauffage central dans l’église.

 En 1961, travaux de réfection des murs extérieurs en grès rose sur la façade arrière et rénovation complète de l’intérieur avec le concours de l’artiste peintre Olin et du maître André Bilger, entreprise de peinture à Mulhouse.

 Une dernière rénovation complète de l’intérieur a lieu en 1986-1988 sous la direction du curé Raymond SCHWERTZ. 

En 2006, une rénovation de la toiture et des façades est réalisée par la Ville de Mulhouse. A l’intérieur, le chœur est surélevé, un sol en bolon est posé dans cette partie de l’église, ainsi que sous la tribune de l’orgue. Un espace dédié à la célébration du sacrement de la Réconciliation est également réalisé sous la direction de l’architecte Jean BAUMANN.

L’orgue CALLINET est restauré par Hubert BRAYE en 2012.